Le piège de papier – Kyra Dupont Troubetzkoy
Quatrième de couverture
Elles ont presque vingt ans quand elles se retrouvent sur les bancs de l’Université et se découvrent de troublants points communs. La méfiance initiale fait vite place à une complicité sans faille. Les deux jeunes femmes noueront une amitié amoureuse, vivant un véritable Éden, inventant leur monde, le modelant au gré de leurs imaginations fécondes, se cachant derrière des identités fictives, aiguisant sans le savoir leurs ruses d’écrivaines. Ce qu’elles deviendront. Autrices, mais aussi rivales.
Mon avis
C’est au lycée que la narratrice fait la connaissance de L. Et elle la déteste sur le champ, la soupçonnant d’être à l’origine de sa rupture avec son petit ami Victor et donc de lui infliger son premier chagrin d’amour. Elle ne comprend d’ailleurs pas ce que son copain a pu trouver à cette fille pourtant insignifiante, au physique banal. Une fois à l’université – où l’héroïne se cherche, rate sa première année et se réoriente –, elle se retrouve lors d’un cours avec L, et ensuite confrontée à la bande d’élèves populaires de son ancienne école. Au départ réticente à les côtoyer, elle succombe vite à ce groupe hétéroclite et fascinant, et contre toute attente elle se rapproche fortement de L. Au fil de leurs années estudiantines, elles finissent même par devenir meilleures amies. Malheureusement, un événement fera s’étioler leur entente idyllique et sonnera le début des déboires de la narratrice…
Avec le thème de la passion des livres, l’amitié est l’autre sujet central de ce roman. Toutefois, la relation amicale décrite n’est pas parfaite, tendant progressivement vers une rivalité malsaine. L’histoire n’est pas sans rappeler L’amie prodigieuse d’Elena Ferrante, dans le sens où les liens d’amitié s’avèrent plus qu’ambigus. Un autre livre auquel j’ai pensé durant ma lecture : D’après une histoire vraie de Delphine de Vigan, avec cette même volonté d’éviter de nommer les jeunes femmes, et d’avoir donné la simple initiale L à la protagoniste mystérieuse.
Malgré une construction à mes yeux un peu linéaire et un dénouement convenu, Kyra Dupont Troubetzkoy a su me tenir en haleine avec une atmosphère intrigante, en laissant planer de sérieux doutes quant à la vraie nature de L, femme à la personnalité difficile à cerner, tant pour les lecteurs que pour son amie.
En lice pour le Prix du Livre de la ville de Lausanne 2024, Le piège de papier évoque les méandres de l’égo, la perte de repères, les difficultés à trouver sa place face aux autres et face à ses paires, et les impostures. Abordant également le monde impitoyable de l’édition parisienne, l’auteure nous immerge dans ce panier de crabes aux pratiques peu glorieuses. Par le biais de l’amour (voire de l’obsession) des deux femmes pour l’écriture et leur volonté de devenir des romancières reconnues, nous découvrons les coulisses de la création littéraire et les sacrifices consentis pour arriver au Graal de la publication.
En résumé
Impostures et rivalités au programme d’une amitié particulière !
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A propos de l’auteure du roman
Née à Genève, Kyra Dupont Troubetzkoy est de nationalité franco-suisse. Diplômée de l’Institut des Hautes Études Internationales de Genève et après des études en journalisme à Londres, elle part en tant que bénévole dans le Nord du Kenya en 1995 pour le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies, puis comme volontaire pour l’OSCE à l’organisation des premières élections locales en Bosnie-Herzégovine après la guerre en 1996 et pour Handicap International au Cambodge en 1997. Elle travaille ensuite comme journaliste pour plusieurs médias suisses et étrangers. A partir de 2007, elle se consacre à l’écriture et publie plusieurs romans, notamment aux Éditions Luce Wilquin et Favre.
A propos du livre
Éditions Favre
Lausanne, janvier 2023
264 pages