Agnus Dei – Julien Sansonnens
Quatrième de couverture
Broye fribourgeoise, fin des années quarante: on veut refouler la guerre et les secrets indignes, on cultive le maïs et le tabac Burley, on vénère l’Immaculée Conception. À Gletterens, tout juste revenu de la mobilisation, l’austère forgeron du village ne reconnaît plus les siens: à quels troubles jeux s’est adonnée Jeanne-Sarah, sa douce épouse, tandis qu’il portait les armes? Dans l’arrière-salle des troquets où l’on rit fort, par les allées paisibles du cimetière paroissial, la rumeur enfle: les riverains du bourg en sauraient-ils plus qu’il n’y paraît?
Mon avis
Après quatorze ans de réclusion, Marcel C. sort enfin de prison. Il s’installe alors dans la capitale fribourgeoise, ne souhaitant pas retourner dans son village de Gletterens. Avant son emprisonnement, il était maréchal forgeron dans cette petite commune de la Broye et tout semblait lui sourire : une jolie femme, deux enfants, une activité prospère. Alors comment en est-il venu à passer autant d’années derrière les barreaux ?
Dans son nouveau roman, basé sur un fait divers réel, Julien Sansonnens déroule l’histoire de Marcel et de Jeanne-Sarah, son épouse. Après avoir fait connaissance lors d’un bal en 1937, ils se marient et ont rapidement un fils, puis une fille. Malheureusement, la guerre arrive. Même si la Suisse n’entre pas dans le conflit, les hommes sont mobilisés et surveillent les frontières. Cette épreuve sonnera le glas du couple. Au retour de Marcel, rien ne sera plus comme avant…
Agnus Dei se situe en pleine Broye fribourgeoise, un territoire catholique, morcelé et encerclé par les Vaudois protestants. Sur ce plateau fertile, on cultive le blé, le maïs, la betterave sucrière, et surtout le tabac. Dans cette communauté resserrée, les agriculteurs apparaissent comme des forces de la nature, des gaillards travailleurs et honnêtes. Mais planent aussi un état d’esprit craintif envers les étrangers et l’extérieur, et la religion oppressante et omniprésente. Julien Sansonnens dépeint extrêmement bien ce terroir, ces vies de labeur, et ces mentalités compliquées à faire évoluer.
Grâce à son écriture ciselée et poétique, Julien Sansonnens a le sens des belles descriptions et retrace la genèse d’un drame, en explicitant subtilement les tenants et les aboutissants. L’auteur broyard nous offre un récit puissant, sombre et remuant. Une certaine empathie pourrait même surprendre le lecteur, ressentant presque de l’empathie pour le forgeron. L’évocation du destin de Marcel C. permet également d’appréhender une partie de l’histoire de la Suisse du point de vue des campagnes, des années vingt au sortir de la seconde guerre mondiale.
Après Septembre éternel (Ed. de l’Aire, 2021), Julien Sansonnens continue sa fine observation des petits gens et des drames humains, en livrant une vision critique de notre société. Ici, au cœur de son exploration, nous trouvons la thématique du carcan de la religion – culpabilisante et directive –, des cercles restreints dans des contrées isolées, et toujours ces hommes en proie à leurs démons.
En résumé
Un roman coup de poing basé sur un fait réel !
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A propos de l’auteur du roman
Né en 1979 à Neuchâtel, d’origine broyarde, Julien Sansonnens suit des études en sciences sociales à l’université de Lausanne. Il vit aujourd’hui en Valais et travaille dans le domaine de la santé publique. En 2019, il reçoit le prix Édouard-Rod pour L’enfant aux étoiles, roman inspiré du drame de l’Ordre du Temple solaire. En 2021 sort Septembre éternel, qui lui vaudra d’être sélectionné l’année suivante pour le Prix des lecteurs de la Ville de Lausanne et pour le Prix du Public RTS et de finalement remporter le prix Auguste Bachelin. Agnus Dei est son cinquième roman.
A propos du livre
Éditions de l’Aire
Vevey, octobre 2023
120 pages