Sur le plancher des vaches – Laurent Eltschinger

Mon avis

Dans ce deuxième tome, Jean-Bernard Brun, alias JiBé, est de retour au travail après une année sabbatique. Fraichement promu Lieutenant, et éprouvant quelques difficultés à endosser ce nouveau rôle, il est vite remis dans le bain avec une affaire qui le conduit à Treyvaux. La petite commune du canton de Fribourg est un village paisible, mais des choses étranges sont survenues dans la ferme de Conrad. Trois de ses vaches sont en effet décédées dans des circonstances louches. La police est mise au courant, de même que le vétérinaire cantonal, un suisse allemand peu commode. L’agriculteur reste inconsolable à la suite de la perte de ses vaches adorées, qu’il avait baptisées d’après les prénoms de ses anciennes petites amies. Vieux garçon, sans famille, en marge des autres villageois, le sexagénaire a du mal à se mettre à la page, se sentant dépassé par la technologie et la paperasse, et lui ayant déjà valu sueurs froides et tracasseries.

Parallèlement, au cœur du Val-de-Travers, sur les hauteurs du canton de Neuchâtel, Pierre-Pascal Gaillard a le vent en poupe. Et pour cause : il s’est lancé dans le projet du premier parc éolien du Jura suisse. Après oppositions et discussions, il arrive à bout touchant pour dresser le premier pylône. L’autre raison de sa venue dans le village se trouve liée à son histoire familiale et aux conséquences de la mort de ses parents alors qu’avec son frère, ils étaient enfants.

Tel un ambassadeur du terroir, Laurent Eltschinger livre ici un plaidoyer pour un retour à plus de simplicité et aborde avec justesse et franchise la dureté du métier d’agriculteur, entre travail harassant, prix en baisse, gestion administrative poussée à l’extrême, manque de reconnaissance criant, le tout pour un salaire de misère. Un autre débat est lancé entre les lignes avec Ia question de l’éolien, sujet hautement actuel avec la crise énergétique à venir. En somme, il ne s’agit pas uniquement de crimes à résoudre mais l’auteur va plus loin en abordant des points de société centraux.

À l’instar de son premier roman Le combat des vierges (Montsalvens, 2021), Laurent Eltschinger signe à nouveau un polar fort plaisant à lire. Avec un rythme très fluide, cette enquête inter-cantonale complexe nous faisant voyager entre Fribourg et Neuchâtel se lit avec entrain, grâce à une plume vivante et une affaire riche en rebondissements. L’auteur fribourgeois dépeint avec finesse ses personnages et ajoute beaucoup d’empathie dans ses histoires, ainsi que des touches d’humour. Tout comme son équipe, le lieutenant Brun est un flic touchant et attachant. Beaucoup d’humanité se dégage de ce récit parfois émouvant et dur. Cette nouvelle affaire résolue par JiBé Brun m’aura conquise, j’en redemande !

En résumé

Une deuxième enquête très réussie !